Catherine Hamelle, auteure du livre Une prison sans mur, a été agoraphobe pendant une trentaine d’années. Elle reprend dans son livre ses notes de toutes ces années, et parle des différentes thérapies entreprises pour comprendre et tenter de se guérir.
J’ai été la rencontrer et l’ai interviewé pour connaitre ses « trucs » à elle, ses techniques et ses chemins parcourus pour en être là où elle est aujourd’hui. Elle envoie un message aux paniqueurs, optimiste et réaliste…
Alice : Comment vous sentez-vous aujourd’hui?
Catherine : Aujourd’hui je vais bien. J »ai été agoraphobe pendant 30 ans, je suis sortie de mon agoraphobie 99, donc de 69 à 99 j’ai été très profondément agoraphobe – et même par moments je n’arrivai plus à sortir de chez moi. J’ai eu la chance immense de travailler la plupart du temps dans des soc familiales, ça m’a permis de me réaliser prof, puisque je me suis sentie quand même assez protégée.
Alice : Vous étiez en sécurité…
Catherine : Je me sentais en sécurité, parceque je pense que l’agoraphobie est dù à un sentiment d’insécurité assez profond de l’enfance. Il y a une très belle image en médecine chinoise qui est l’image de l’arbre. Lorsque un arbre pousse dans un sol qui n’est pas sain, les racines ne vont pas aller très profondément, et quand il y a une tempête l’arbre est déraciné. Quand le terrain est sain, bon et sécurisé, l’arbre va pousser avec des racines puissantes, et quels que soient les coups de vent, il va plier, mais il ne va pas être déraciné, il ne va pas se casser. Ce sentiment d’insécurité qu’on a dans l’enfance nous poursuit à l’age adulte. Voila ce que j’ai pu mettre à jour, moi, dans mon parcours de soin sur moi-même, et qui m’a permis de sortir de l’agoraphobie .
Alice : Pour vous, aujourd’hui, vous êtes sortie de l’agoraphobie ?
Catherine : Je suis sortie de l’agoraphobie . Je ne dis pas que par moments, je n’ai pas d’angoisses. Ce que j’essaye de faire, c’est de comprendre la source de cette angoisse. Tout le monde est comme ça, mais peut être qu’il y a des gens qui ont la chance extrême de na pas avoir d’angoisses – ce n’est pas mon cas, et ce n’est pas le cas de beaucoup de gens, mais si on arrive à mettre le doigt sur la source de l’angoisse, déjà elle va mieux. Il n’y a plus d’angoisses qui me paralysent, qui m’empêchent de prendre ma voiture, de prendre le métro, l’autobus, le train ou l’avion. L’angoisse ne me bloque plus, je peux agir et ne pas être entravée dans une prison sans mur, comme je le dis dans mon livre.
Alice : C’est une très belle image.
Catherine : Oui parce-que c’était vraiment ça. J’ai eu le chance de pouvoir travailler. Malheureusement il y a beaucoup de gens qui restent chez eux et qui ne peuvent pas travailler, j’ai eu la chance de me réaliser professionnellement, mais ce n’est pas donné, ce n’est pas tout le monde.
Alice : Avez-vous un message à faire passer aux agoraphobes?
Catherine : Le message que j’ai à faire passer aux agoraphobes est déjà de parler, parler à son entourage, de dire ce qu’on ressent, de ne pas en avoir honte.
Moi je suis restée silencieuse, même vis a vis aux membres de ma famille parce-que j’étais profondément honteuse, je pensais que j’étais folle. L’agoraphobie, on en parlait absolument pas, donc pour moi montrer mes faiblesses, montrer ma folie, il n’en était pas question. Donc il faut parler, il faut aussi se faire aider, maintenant il existe des thérapies, dont les comportementalistes qui sont très efficaces, il faut se faire aider, parce-que je ne pense pas qu’on puisse s’en sortir tout seul. Parlez, faites vous aider et vous en sortirez. Moi j’ai mon exemple, mais j’ai d’autres exemples autour de moi. Je suis devenue réflexologue, j’aide les agoraphobes dans leur parcours pour sortir de l’agoraphobie. Il faut se faire aider, on a vraiment toutes les chances d’en sortir avec la volonté, le bon thérapeute, et ça marche!
Alice : Pour moi ça a été assez rapide. Vous êtes quand même resté 30 ans agoraphobe. Mais a partir du moment où vous avez découvert ce que vous aviez, vous avez mis très peu de temps, deux ans?
Catherine : Oui j’ai mis 2 ans pour remonter la pente. Le point presque antérieur de mon ago est venu à mon esprit, ça a été comme un déclic, j’ai l’image de la personne qui tombe au fond de la piscine, on remet un coup de pousse de pied et on remonte. La descente a été très lente, la remontée a mis deux ans. Il a fallu que j’arrive toute seule a reprendre ma voiture pour aller loin, prendre le métro pour faire de plus en plus de stations, l’autobus, etc…
Alice : Vous y êtes allé graduellement, comme une tcc…
Catherine : Oui, comme ces thérapies, il faut vraiment parler aux thérapeutes, ne pas rester enfermer dans son mal-être. Vraiment, c’est inhumain l’agoraphobie, personne ne peut comprendre sans l’avoir vécu, personne ne peut comprendre comme c’est douloureux, et vraiment, il ne faut pas rester enfermé. Chacun devra bien sûr trouver son thérapeute, sa clé pour en sortir. Mais on s’en sort!
Alice : Au risque de ‘spoiler’ ce qu’il y a dans le livre, pouvez-vous rappeler les thérapies, ou ce que vous avez entrepris.
Catherine : La première thérapie que j’ai entrepris a été en 1991, mon médecin m’a conseillé d’aller voir une sophrologue, qui m’a aidé à dépasser certains traumatismes de mon enfance. Mon sentiment d’abandon a été fort, elle m’a vraiment aidé à dépasser le traumatisme.
Ensuite j’ai eu recours à un autre sophrologue qui faisait également de l’ostéopathie crânienne, qui a fait resurgir un souvenir enfouit dans ma mémoire, ça a été très violent.
Ensuite j’ai fait une analyse qui a duré 3 ans, …
J’ai été extrêmement ému et plus encore de votre témoignage dans l’émission « mille et une vies » . Je dois vous dire que je n’ai pas pu aller jusqu’au bout. Je suis phobique depuis plus de trente ans, transport, impossibilité de déglutir, ce que je nomme la non vie. Bravo à vous de vous en être sortie. Mais votre témoignage est très important pour nous, les phobiques.
Impossibilité de déglutition ? Vous ne pouvez pas manger c’est ça ? Par ce que ça a été mon cas pendant 1an j’ai perdu 15kg même la soupe ne passait pas du coup j’ai été passé De examens qui ne montraient rien, mais si je sais que je ne suis pas là seule à avoir à ça me rassurerait un peut. Je sais que c’est psychologique du coup mais c’est bizarre j’ai eu beau chercher je n’ai trouvé personne qui avait ça à part des gens anorexique ce qui n’est pas mon cas, j’aime manger je suis grosse gourmande. Aujourd’hui ça va je mange mais tout doucement et Toujours avec un verre d’eau à côté. Ah et dsl si mon commentaire n’est pas vraiment attendu ici mais je suis nouvelle ici et je suis un peut perdu :P
Merci Geraldine pour ce commentaire et cet optimisme! J’espère que tu trouveras les réponses à tes questions, le temps aide, les efforts quotidiens, l’ancrage et la clairvoyance!
Je n’ai pas testé l’EMDR, mais pour en avoir beaucoup entendu parlé, je ne pense pas que cela m’étais destiné. Apparemment cela est utile pour un gros choc psychologique, un événement très marquant. Quand l’agoraphobie s’installe petit à petit et tranquillement, c’est plutôt, comme tu l’exprime bien, un auto-apprentissage de la peur qui se fait sur une longue période… Je reste très optimiste personnellement, même si j’ai peur de pas mal de trucs et reste assez bloquée, j’arrive à remonter la pente dans l’autre sens, et ce projet Agorafolk m’y aide beaucoup, par les rencontres que j’ai pu faire, et par le fait d’aider d’autres personnes…
Je cherche à faire d’autres interviews, d’autres anciens paniqueurs, il y a plein, j’espère trouver prochainement :)
Très bonne semaine à toi et à bientôt sûrement…!
Je suis prêt à vous répondre en tant qu’ancien trouble paniqueur mais toujours emmerdé par des symptômes: difficulté à déglutir, phobie des ponts. Une vie difficile
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J’ai lu le très beau livre de Catherine Hamelle qui, m’a d’ailleurs fait pleurer car il met le doigt sur la souffrance que nous vivons tous les jours, nous les agos. Je trouve génial qu’elle parle de ce sentiment d’abandon qui, à mon sens est le fil conducteur commun de beaucoup d’agoraphobes. Certains n’en n’ont peut-être même pas conscience; cela a d’ailleurs été le cas pour moi, qui jusqu’à il y a peu, n’arrivais pas à considérer le sentiment d’abandon comme me concernant. Bien que je n’ai pas connu mon père (qui a décider de renier ses enfants après que ma mère l’ai quitté), je n’ai jamais eu le sentiment qu’il m’ait manqué, mais ça c’est ce que le conscient me disait or le subconscient lui, avait une autre version de mon ressenti ! L’histoire qu’on se raconte n’est pas forcément proche de la réalité ! Ma mère m’a appris que de 1 an à 6 ans, je n’ai pas arrêté d’aller de nourrice en nourrice et une fois, j’y suis restée pendant plus de deux mois sans voir mes parents. Comme quoi tout s’explique et je ne vous raconte pas tous les traumas qui ont ponctué mon adolescence (je devrais écrire un livre !) Bref, après toutes ces années à côtoyer la souffrance des symptômes de l’ago. j’ai fait des recherches personnelles en demandant à ma mère de me raconter mon enfance et cela m’a apporté des réponses à ce sentiment horrible que je ressens lorsque je fais des crises.
J’ai exploré la psychothérapie qui n’a pas porté les fruits que j’attendais, l’EMDR, qui m’a pas convaincu et aujourd’hui, je suis une TTC qui m’aide à comprendre que cette peur est juste un comportement acquis et qui fait fis des vraies causes de mon ressenti même si cela me dérange un peu (c’est comme si votre crédibilité était remise en cause).
Je n’ai pas testé l’hypnose.
Cette interview me donne envie de tester la sophrologie.
Merci infiniment de cette interview qui donne des réponses concrètes sur ce qu’on vit.
À +